Pas besoin de fourchette pour goûter à l’essence d’un pays. En Tunisie, certaines saveurs se savourent autrement. À la main. Avec les doigts. Avec l’âme. Parce que derrière ce geste simple, il y a une tradition, une proximité, une manière d’être ensemble.
Asslemaa,
et bienvenue dans un monde où les doigts parlent autant que les mots.
Manger à la main, chez nous, ce n’est pas de la négligence. C’est une habitude ancestrale, transmise sans discours. Un geste automatique, intime, presque sacré.
Chez nous, manger à la main, c’est une manière d’être ensemble. Une manière de ressentir la nourriture, de la partager, de la vivre avec les autres. Et si tu as déjà goûté un bon plat de mloukhia ou Kafteji sans y tremper le pain directement, c’est que t’as pas encore goûté vraiment.

Mais alors, qu’est-ce qu’on mange à la main ?
La ojja : qu’elle soit aux merguez, au poulet ou aux fruits de mer, elle est presque toujours servie brûlante dans une poêle. Tu déchires un bout de pain, tu le plonges dedans, et tu laisses le jaune d’œuf encore coulant faire le reste.

Les plats de Mechouii: viande, kebda mchouia, ou même une simple kefta… toujours accompagnés de pain qu’on trempe dans la sauce, sans retenue.

La mloukhia, ce plat noir et intense, qu’on mange souvent.. Il faut du pain, et des doigts, pour bien apprécier sa texture.

Et il y a plus. Chaque région a ses propres plats, ses propres gestes.
Un art, mais aussi un code
On ne plonge pas ses doigts n’importe comment. Il y a une étiquette. On mange du côté de son assiette, on ne fouille pas dans celle du voisin. On s’essuie discrètement, on partage, mais on respecte. C’est tout un savoir-faire collectif.
Et pour les plus jeunes ? Manger à la main, c’est souvent la première leçon familiale. On t’apprend comment tenir le pain, comment ne pas salir toute la nappe, comment doser sans gaspiller. On rit, on apprend, on grandit avec ces gestes.
Et pour ceux qui pensent que c’est “sale” ?
Les mains, chez nous, sont lavées religieusement avant et après. Et puis, on ne mange pas avec n’importe quelle main. C’est la droite, toujours, comme signe de respect.
Aujourd’hui, avec la mondialisation, les couverts sont partout. Mais cette manière de manger reste ancrée dans les repas de famille, les pique-niques, les fêtes religieuses, ou les déjeuners improvisés à la plage.

Alors la prochaine fois qu’on te tend une assiette, sans fourchette…
Dis-toi que c’est plus qu’un repas.
C’est une invitation à faire partie du cercle. À manger tunisien, à vivre tunisien.